Algérie du Peuple : Généalogie d’un concept ?

Le 12 décembre 2019 acte la naissance de l’Algérie du peuple. Cette date est symboliquement chargée dans l’histoire politique de l’Algérie car c’est la première fois qu’une large majorité de la population exprime son rejet radical des élections en clamant haut et fort : « Pas de vote avec les gangs ». Pour la première fois, le voile est définitivement levé sur la véritable nature du système politique en Algérie. Car, aucun des épithètes utilisées jusqu’ici ne lui correspond (dictatorial, autoritaire, militaire, militaro-policier, politico-militaire, illisible, opaque…). Et même l’épithète révolutionnaire d’antinational[1]survenu au temps du « Hirak » sous la plume d’une figure du pouvoir n’a pas atteint sa quintessence. Mais le bon sens populaire, à travers ce slogan historique « Pas de vote avec les gangs » nous livre son vrai visage : un système mafieux, criminel et prédateur. Dans l’absence d’un commandement centralisé, ce système est composé de clans frontalement opposés qui ont souvent recours à la rue-au mouvement social- pour régler leurs différends. Nous avons lu dans ce slogan, pour une fois, le véritable diagnostic du mal algérien ; il fallait donc lui donner une traduction politique. Il met en jeu l’existence de deux camps : celui du refus et le camp contre lequel ce refus est prononcé.  Le camp du refus représente la grande majorité du peuple. Il fallait le transformer en un camp politique prenant conscience de son existence. Une existence qui se pose en s’opposant à celle des Gangs. Cette opposition donne naissance à une véritable révolution symbolique car chaque camp a sa propre philosophie. « Pas de vote » représente l’Algérie du Peuple » et « avec les gangs » l’Algérie des Généraux. Ce slogan, donc, marque une frontière symbolique entre deux Algérie : l’Algérie du Peuple et l’Algérie des Généraux.  Cette symbolique révolutionnaire pose le sceau définitif sur l’existence de deux Algérie :

L’Algérie du Peuple et l’Algérie des Généraux.

Physiquement. Ces deux Algérie existent. L’Algérie des Généraux, celle de Club des Pins, celle du pouvoir et des privilèges ; l’Algérie du Peuple, celle des déshérités, des damnés de la terre et des harragas. L’Algérie des Généraux, l’univers du Pouvoir et l’Algérie du Peuple, celles et ceux qui le subissent.

Historiquement. Le présent mime le passé. Hier l’Algérie des Colons et l’Algérie des indigènes et aujourd’hui l’Algérie des Généraux et l’Algérie du Peuple. Club des Pins n’est que l’autre nom des quartiers européens (la ville européenne) et l’Algérie réelle l’autre nom des quartiers ségrégués et des bidonvilles (la ville arabe) et l’Algérien méprisé au temps de la colonie l’est encore au temps de « l’indépendance ».

Si les évènements du 10 et 11 décembre 1960 ont acté définitivement la naissance du Peuple algérien face à une idéologie impérialiste qui voulait nier son existence, le slogan, du 12 décembre 2019, à son tour, acte la naissance de l’Algérie du Peuple.

Symboliquement. La scène algérienne est une scène théâtrale tragique. Deux volontés se font face. Hier la volonté coloniale face à la volonté indépendantiste et aujourd’hui la volonté du « Système » contre la volonté populaire. La concordance des deux temps s’impose : le temps de la colonie et celui de l’indépendance. En clamant, le 5 juillet 2019, sur les rues d’Alger, le mantra « Le peuple veut l’Indépendance », le peuple atteste et signe que l’Algérie est un pays encore occupé. Nous sommes, le seul peuple, dans l’histoire contemporaine, à avoir revendiqué deux fois dans son histoire : l’indépendance[2].

La scène tragique met en scène deux volontés frontalement opposées s’excluant l’une l’autre et ne pouvant cohabiter dans le même espace. Et rien de grand ne peut advenir dans cette situation. Le dépassement est nécessaire et salutaire. Durant la période coloniale, il s’est effectué par le mouvement indépendantiste qui s’est soldé par une guerre de libération.

Depuis 1962, le système actuel, symbolisé à l’époque, par l’Armée des Frontières s’est imposé par la force des armes sur la scène politique. Cette armée dans la peau d’une armée de conquête[i][3]et de pouvoir a marché sur Alger en semant la mort. Et depuis, cette Armée ne fait qu’imposer sa volonté en étant le seul vrai acteur politique, économique et social.

Face à cette volonté, la Résistance n’a jamais cessé et s’est manifestée depuis 1962. Ella a pris des formes multiples (des personnalités historiques les années 60 puis une opposition partisane (de gauche et islamique) pour se cristalliser en 2019 dans le « Hirak ». Il se présente comme un moment historique dans l’histoire de la contestation populaire car il en est la synthèse. Pour la première fois dans notre histoire, une contestation fut globale, massive et unitaire. Le Hirak opère comme une césure. Il coupe notre histoire en deux. Il y a un avant et un après le Hriak. C’est un évènement philosophique indispensable et un horizon indépassable pour lire et comprendre la réalité algérienne présente et future. Si penser c’est comprendre le réel pour le transformer, s’impose à nous alors une bonne lecture et interprétation du « Hirak ». L’après Hirak est tributaire de cette lecture. Le moment est historique car il est destinal : l’Algérie de demain découlera de cette lecture.

Puisque le Hirak est la synthèse du politique en Algérie, l’Algérie du peuple propose une compréhension historique du Hirak.

  1. Au préalable, quelques questionnements :

Peut-on supposer qu’un soulèvement populaire de l’ampleur du Hirak puisse être un mouvement spontané[4] ? Alors que le divorce entre l’Armée est le peuple était acté et irrémédiable[5] à la suite des évènements d’octobre 1988, et juin 2001 en Kabylie ainsi que ceux de la sale guerre, surgit le slogan de la célébration fraternelle entre l’Armée et le peuple « Djeich –Chaab Khaoua Khaoua » pour lui donner une virginité et l’habiller d’un rôle salvateur aux premières heures du Hirak ? « Djeich- Chaab Khaoua Khaoua » est-il un slogan populaire ? En 2011, dans le sillage du printemps arabe, José Garçon, journaliste à Libération, en couvrant les manifestations à Alger relevait «Jamais personne n’aurait l’idée de crier « Bouteflika dégage », s’amuse Hakim. Ici, le Président est interchangeable[6].» ; comment expliquer alors que le Hirak à sa naissance s’est focalisé sur le non au 5ème mandat ? Bouteflika, ya el Maroqui makache ouhda Khamsa (Bouteflika le marocain pas de 5ème mandat) peut-il être un slogan populaire ? Le pouvoir s’est autorisé la paternité du Hirak en le qualifiant de Hirak béni et original et déclarer après sa fin (le Hirak est mort-fini) car celui-ci a atteint ses objectifs par l’imposition de Tebboune ; n’est-il pas temps de reconnaître qu’au sein du Hirak coexistent deux forces opposées : celle du Hirak institutionnel et celle du Hirak populaire ? Comment expliquer la rencontre « complotiste » du 30 mars entre Toufik « le retraité », Saïd Bouteflika et Louisa Hanoune ? Avant de questionner la réaction de Gaïd Salah à l’encontre du drapeau Berbère contournée et condamnée par le verdict et la sagesse populaire, comment expliquer son apparition et sa présence dans un moment hautement politique ? Sa présence, à ce moment de l’histoire, n’apporte- t-elle pas plus de confusion que de clarté ?

  1. Le Hirak : une scène tragique :

Deux volontés, deux forces occupent la scène : le Hirak institutionnel et le Hirak populaire. Le premier acte de cette tragédie s’est effectué dans le Hirak institutionnel par l’assassinat de Gaid Salah et la mise à l’écart de son clan. (Pas de mort naturelle avec les gangs). Il s’est clôturé le 12 décembre 2019 par la nomination de Tebboune. Le deuxième acte de la tragédie est en cours ; il oppose les acteurs du Hirak institutionnel (les Gangs), au Hirak populaire. Force est de reconnaître que depuis 1962, le système a survécu à toutes les crises et dans chaque crise il se régénère. Les crises apparaissent comme une condition de son renouvellement. Une autre manière de dire qu’il en est l’instigateur.  Mais contrairement à toutes les autres crises, la spécificité du « Hirak » a profondément déstabilisé le régime qui se trouve totalement paralysé et dans une impasse : il ne peut ni se maintenir ni se réformer, ni céder le pouvoir ni l’exercer[7].

Le pouvoir a pu se régénérer après chaque crise car en face ne s’est jamais trouvé une force sociale radicale et inclusive ?  Le Hirak populaire peut-il se transformer et devenir une force alternative ?

Si octobre 1988 fut le soulèvement de l’espoir, le Hirak 2019 peut-il être celui du changement ? Si le Hirak atteste que nous n’avons pas pu bâtir une génération révolutionnaire car le pouvoir pour perdurer a toujours su trouver les outils (répression-menace-corruption…) pour fragmenter le corps social et le fragiliser. Il reste que le Hirak est gros d’une révolution car il porte en son sein le Nouvel acteur révolutionnaire sur lequel je reviendrai.

  1. Messages et philosophie du Hirak.

La vérité philosophique du Hirak s’est cristallisée le soir du 11mars autour du « Yetnahaw gaa3 » (qu’ils dégagent tous). Ce slogan véhiculé par une voix populaire a enveloppé l’espace et le temps algérien. Il traduit toute la colère d’un peuple et son attente. Des distances astronomiques séparent les deux slogans de « Bouteflika dégage » (non au 5eme mandat) au système dégage (Bouteflika dégage, Toufik dégage, DRS dégage, partis dégage, assemblée dégage …..). Le «Tous» traduit une radicalité révolutionnaire, d’une ancienne gouvernance à une nouvelle, d’une souveraineté à une autre, d’une volonté à une autre. Cette radicalité exclut de facto le pouvoir de toute idée de négociation future. Le Hirak est comparable dans notre histoire à l’après 8 mai 1945. L’ensemble des acteurs politiques de l’époque étaient totalement convaincus que la voix politique est sans issue face au colonialisme. L’impasse algérienne d’aujourd’hui renvoie à celle des années 50. La voix révolutionnaire s’impose.

Le Hirak et Renaissance de l’Algérianité. Par son caractère global, massif et unitaire, nous avons retrouvé dans l’esprit du Hirak notre dimension collective. Nous faisons peuple. Nous avons retrouvé la joie d’être ensemble dans des moments de communion. Sous le règne de ce système, le peuple héroïque de 1962 est devenu le peuple-objet, une masse soumise à son chef, le populisme autoritaire des années 70 au peuple-enfant, jugé immature, incivique, chaotique qu’il faut donc discipliner et éduquer sous Bouteflika. Par son exemplarité, le Hirak a forcé l’admiration du monde et a démontré que le système, en l’occurence l’Algérie des Généraux, est le vrai obstacle qui s’oppose à ce désir de changement pleinement revendiqué par les protagonistes du Hirak.

Trois grands moments historiques caractérisent la présence au monde de notre Algérianité. De « Tahya el Jazaïr » en 62, Pauvre Algérie et la négation de soi en 99, à « Nous sommes en train de revivre » en 2019. Cette revivification de notre Algérianité doit prendre forme et s’inscrire dans le réel.

Le Hirak et la politique. Par sa globalité et étant la synthèse de la résistance à ce système depuis 62, le Hirak n’a pas donc de couleur partisane. Son seul message politique est son désir de changement et l’appel au changement radical, à une nouvelle forme de gouvernance.

Le Hirak et la politique. Par sa globalité et étant la synthèse de la résistance au système depuis 62, le Hirak n’a pas donc de couleur partisane. Son seul message politique est son désir de changement et l’appel au changement radical, à une nouvelle forme de gouvernance.

Le Hirak et le mal algérien. Le diagnostic est inédit et sans appel. Jamais, lors d’un mouvement social de contestation, l’origine du mal algérien n’a été aussi clairement défini et affirmé. Pour la première fois, l’année 62 est désignée comme la date fatidique du mal algérien. Un groupe en 62 (à leur tête le machiavélique et l’imposteur Boumediene), s’est accaparé du pouvoir, de la légitimité historique et s’est approprié l’Algérie. Ce fut le péché originel[8].  Depuis cette date, la force s’est imposée sur le champ politique et en déployant sa logique, elle a fini par défigurer l’Algérie et l’Algérien[9].

Les Limites du Hirak. Le « Hirak institutionnel » a atteint ses objectifs en imposant Tebboune et en faisant la chasse aux militants du Hirak populaire en vue de l’éradiquer de la scène politique pour asseoir sa légitimité. Force alors est de reconnaître que le Hirak ne portait pas en son sein des potentialités révolutionnaires. Certes, la colère est réelle, profonde et le désir de changement radical légitime, mais comment expliquer que cette colère n’a pas eu de traduction politique ? Pourquoi ne s’est-elle pas incarnée dans une force sociale ? En l’absence d’une force sociale ou politique qui appelle à manifester et en insistant sur la non-représentativité du Hirak (le Hirak n’a pas de représentant), nous sommes tombés dans la tragédie de l’horizontalité. On a fait de la non-représentativité du Hirak une force alors que c’est là sa faiblesse. L’exemple des Gilets jaunes en France est là pour nous enseigner que dans l’absence d’une organisation préalable, la colère sociale ne se transforme pas en force politique.

Que faire pour que le Hirak populaire se transforme en Hirak révolutionnaire ? Si nous voulons cette fois-ci qu’on ne nous vole pas une seconde fois notre Révolution, nous devons respecter l’esprit classique de la théorie révolutionnaire à savoir, Organisation-Agitation-Insurrection-Indépendance. En 1954, les acteurs de l’Appel du 1er novembre (ont inversé la stratégie révolutionnaire (Insurrection-Agitation-Organisation), et depuis cette inversion nous courons derrière l’Organisation. Le congrès de Tripoli en1962 et les divergences qui l’ont accompagné ont définitivement acté la non-naissance du FLN comme parti politique[10]. Un corps sans âme selon Boumediene, en 1988 Chadli a fait appel à Mehri pour ressusciter le cadavre. Nous connaissons la suite. L’ensemble des luttes fratricides qui ont marqué notre guerre de libération et les crises qui l’ont suivie jusqu’à ce jour trouvent en grande partie leur explication dans l’inversion de la stratégie révolutionnaire et l’absence de l’Organisation.

En 2019, nous avons commencé par l’Agitation (Le Hirak). Et depuis 2019, nous courrons encore derrière l’Organisation. La culture de la suspicion, de la méfiance et de la manipulation pour semer la discorde entre les militants afin que le Hirak ne se transforme pas en un corps collectif tel qu’il était en 2019, plus la culture de la répression qui s’abat sur les militants pour les terroriser et éradiquer du champ social l’idée même de la résistance ; ce climat de suspicion et de terreur vise à tuer l’espoir qu’une alternative au pouvoir est possible. L’énergie déployée par le pouvoir est au service de l’immobilisme et de son propre renouvellement. Pour garder cet espoir vivant et dynamiser la scène politique et répondre aux attentes populaires.

L’Algérie du peuple se présente comme étant la résultante du Hirak et son dépassement évolution.

Afin de dépasser le piège de l’horizontalité ( le Hirak n’a pas de représentant, qui es-tu pour parler au nom  du Hirak ?) et les épithètes donnés au Hirak par le pouvoir militaire ( Hirak béni, Hirak originel) et maintenant le Hirak est mort, le Hirak est fini scandés par les partisans de l’Algérie des Généraux ; l’Algérie du Peuple veut doter le Hirak d’un nouveau souffle, d’une nouvelle vision, d’une vraie espérance : le Hirak de l’Algérie du Peuple. L’Algérie du Peuple comme principe organisationnel et le Hirak comme mise en mouvement, traduction et personnification de l’esprit révolutionnaire de l’Algérie du Peuple.

La Philosophie de l’Algérie du Peuple. Elle repose sur trois grands axes qui se sont déployés depuis sa naissance en décembre 2022 jusqu’à juillet 2023.

  1. Le problème algérien: Il s’agissait dans la première approche de définir le problème algérien. Cela nous a conduits à choisir pour notre premier rassemblement le Palais d’Egmont à Bruxelles le mois de février 202. Le Palais d’Egmont répond à la thématique principale du problème politique en Algérie : la question de la Souveraineté. Qui est souverain en Algérie ? Nous sommes revenus sur le même lieu où cette question fut posée dans le discours du 10 février 1927 : qui est souverain en Algérie ? L’impérialisme français ou le peuple algérien ? En formulant la bonne question, le problème algérien est devenu clair. L’idée de l’indépendance est née, la guerre de libération n’est que sa traduction effective. L’Algérie du Peuple sur les traces de l’Etoile Nord-Africaine pose la même question : Qui est souverain en Algérie ? Le Peuple ou l’Armée ? L’Algérie du Peuple ou l’Algérie des Généraux ? L’histoire du Hirak répond à cette question lorsque le peuple demandait l’application des articles 7et 8, l’Armée n’a jugé bon que d’appliquer l’article 102. Preuve en est qu’elle se considère comme la dépositaire et la garante de la Souveraineté et elle nie complètement la souveraineté populaire.
  2. Le Redressement historique: Contrairement à la doxa régnante de l’approche culturaliste incriminant le peuple et le présentant comme le responsable de la crise pour le blâmer et le dénigrer ouvrant au sein de la société une lutte horizontale des pauvres contre les pauvres[11], l’Algérie du Peuple adopte une approche différente et considère que l’anomie sociale et la déliquescence de l’Etat avec sa dérive mafieuse ont des raisons historiques. Si c’est dans l’histoire familiale qu’on cherche des explications aux troubles individuelles, c’est dans l’histoire collective qu’on cherche l’explication aux maux sociaux. Nous avons hérité d’une histoire biaisée, tronquée et falsifiée. Les putschistes de 1962 ont pris le pouvoir par la force des armes et ont nationalisé l’histoire. Le pouvoir est devenu l’écrivain de l’histoire et les Algériens dans leur grande majorité sont prisonniers de la lecture officielle ; le temps est venu de regarder notre histoire avec nos propres yeux : le Redressement historique de l’Algérie du Peuple contre le Redressement révolutionnaire de l’Algérie des Généraux. Les trois grands moments qui ont marqué l’histoire politique de l’Algérie sont l’œuvre des trois hommes issus de l’Armée des frontières : Boumediene a inculqué aux Algériens qu’on ne  gouverne qu’avec la force  réactivant l’insulte coloniale « l’Algérien ne comprend qu’avec le Debouze ( la Matraque) , Chadli a introduit l’ignorance et la médiocrité comme facteurs de gouvernance et Bouteflika a clôturé l’histoire de l’Armée des Frontières et  révélé son essence en introduisant l’Argent avec sa phrase immémoriale en pleine campagne électorale en 1999 : «  tout homme s’achète c’est une question de prix ». La corruption est au fondement du système algérien en 1962[12]. Imaginez le peuple algérien depuis 1962 sous l’image d’un homme : Khchine (fruste), médiocre et riche (caricature). L’ère de la fabrication, selon Hanna Arendt[13] propre aux régimes totalitaires a permis à Boumediene de fabriquer une base populaire peuple et de lea modeler à son image[14]. L’Algérie se résumait à son image. Le tiers-mondisme des années 70 ne visait qu’à supplanter l’absence de légitimité intérieure et l’Algérien de cette période, gonflé par un Etat providence, voyait dans l’image de l’Algérie véhiculée à l’extérieur les symboles de sa propre « grandeur ». C’est le même pari que voulait faire Tebboune en misant sur le BRICS : compenser l’absence de légitimité intérieure par une reconnaissance extérieure. Il s’est trompé d’époque. Ce n’est plus le temps des idéologies mais de l’efficacité. Et l’Algérie, à cette époque, jouissait encore d’un capital révolutionnaire universel qui a été dilapidé par l’Armée des frontières du pouvoir. Le redressement historique est l’antichambre de notre nouvelle indépendance. Ce pouvoir a trahi les attentes exprimées dans le soulèvement national en 1954. Nous sommes passés d’une Algérie glorieuse à une Algérie mafieuse.
  3. Le troisième moment clôture la première phase en juillet 2023 intitulé : le temps de la Refondation.

Refonder est la doctrine philosophique de l’Algérie du peuple. En 62 nous avons libéré le pays et instauré la souveraineté nationale en restaurant la souveraineté de l’Etat algérien qui fut la priorité des priorités du manifeste du 1er novembre.  Nous avons failli dans la construction de l’Etat-national. Le même sentiment d’étrangeté qui caractérisait la relation de l’Algérien avec l’Etat-colonial est ressenti dans l’Algérie indépendante, l’espoir « du nous collectif » soulevé par l’enthousiasme de tahia al Jazaïr en juillet 62 est devenu un enfer et l’exil est devenu un projet de vie. Refonder c’est faire revivre cet espoir et lui donner vie. Quatre ans après le 22 février, le moment est venu d’inscrire le Hirak dans une vision révolutionnaire. C’est le moment des projets révolutionnaires. La situation est mûre pour se transformer en révolution. C’est le temps de la moisson. Le peuple est dans l’attente d’un projet qui lui donne espoir et certitude que cette fois-ci, dans son soulèvement, le changement radical est à l’ordre du jour.

Algérie du Peuple, une révolution symbolique : Deux Algérie se font face. Une Algérie des Généraux qui a imposé son diktat et sa gouvernance depuis 1962. L’Armée des Frontières, pour asseoir sa suprématie devait imposer un modèle de société où les valeurs du Moudjahed vont laisser place aux valeurs du Militaire. Le Militaire a pris la place du Moudjahed. La culture du Moudjahed celle de la générosité et du sacrifice a été supplantée par une culture militaire, culture de spoliation et de domination. Depuis 1962, pour pallier le déficit de légitimité, l’Armée des frontières n’a fait que répandre le poison de la corruption, de la répression et du crime ; le seul statut qu’elle admet pour l’Algérien est celui de domestique, de serviteur ou de mendiant. L’Algérie du peuple veut restaurer la dimension historique de notre Algérianité. La survie de l’Algérie dépend de la restauration de l’être algérien. Le sentiment de renaissance porté par le Hirak est un moment salvateur.

Nous sommes les héritiers de l’esprit de résistance porté par des hommes glorieux aux premières heures de notre histoire. L’Algérie des Généraux a nationalisé Abdelkader et l’érige comme modèle : que vaut cette classe politique comparée à ce personnage ?   Comme Abdelkader est incomparablement plus digne d’éloge que tous les bureaucrates réunis qui prétendent aujourd’hui être ses héritiers politiques, ne serait-ce que parce qu’il fut l’adversaire des pires généraux français, c’est-à-dire ceux qui réprimèrent le plus sanguinairement les révolutionnaires de 1848 et de 1871 […] son évocation pourra seulement servir à mesurer l’exacte indigence et le néant révolutionnaire de la bureaucratie algérienne comparée à ce seul personnage[15].

Face à l’opulence affichée de l’Algérie des Généraux, à son indigence morale et intellectuelle, à son mépris du peuple, à la non vie qu’elle a semé, à l’absence d’horizon et à l’enfer social dans lequel végète l’Algérien, il est injuste de leur témoigner la moindre indulgence, le moindre respect.

Face à la spoliation, à « Ma part du pétrole »[16], au « Moudjahid, un fonds de commerce »,[17] l’Algérie du Peuple veut prôner les valeurs constructives. Des héritiers de l’esprit de résistance, nous voulons devenir pour les algériens de demain la génération des pères bâtisseurs, des pères fondateurs d’une Algérie Alternative. Les valeurs fondatrices pour lesquelles nos pères se sont battus et sacrifies sont encore les nôtres : Honneur, dignité et justice. Une soif de justice habite l’Algérien depuis 1830. Aucun peuple n’a été autant violenté dans son histoire que le peuple algérien au temps de la colonisation extérieure comme de la colonisation intérieure.

Que voulaient les Algériens en 54 ? Que veulent les Algériens depuis 2019 ? Une vie digne avec le sentiment d’être chez eux en Algérie.  L’Algérie n’est pas réduite à ces Généraux mafieux, aux bandits, aux voleurs, aux corrompus, à cette élite des privilèges qui monnaye sa conscience ; il y a encore des hommes en Algérie. Des Hommes du peuple à l’image de l’ensemble des hommes et des femmes, qui au prix de leurs vies, affrontent les gangs aujourd’hui.

Le Hirak est gros d’une révolution : L’Algérie des Généraux, celle du Hirak institutionnel, emploie toute son énergie pour faire avorter le Hirak, reproduire le statu-quo et faire perdurer le système, l’Algérie du peuple veut faire advenir le Hirak et l’accompagner jusqu’à son terme : accoucher d’une révolution, une Algérie alternative.

Pour ce noble idéal, et traduisant l’esprit unitaire du Hirak, l’Algérie du peuple appelle à un front antisystème.

Front antisystème. Le Hirak est un moment historique dans notre histoire politique.  Il a levé définitivement le voile sur la nature du système : un système fondamentalement antidémocratique et antipopulaire et l’ensemble des épithètes utilisé (bouclier démocratique, républicain et populaire, moderne, progressiste) s’évapore devant la réalité objective, et a montré un peuple, un nous collectif exemplaire dans son civisme, sa maturité et animé par le désir de changement politique radical.

Ce front antisystème est l’autre nom d’un pacte républicain pour faire naître l’Algérie du « vendredire[18] ».

Principes pour une union dynamique

  • Sauvegarder les Acquis d’Evian : l’Unité territoriale et l’unité du peuple algérien. Ces acquis ne sont pas des évidences mais le fruit d’une volonté historique forgée par les souffrances, la lutte et les sacrifices ; d’où leur sacralité. Même si ce pouvoir illégitime a affaibli le sentiment national depuis 1962 jusqu’à devenir le symptôme de sa disparition ; nous avons une dette envers la génération de nos pères et notre mission c’est de consolider ces acquis, leur donner vie et les faire prospérer.
  • La Radicalité révolutionnaire : Ce système à travers chaque crise arrive à se renouveler dans une forme nouvelle. Et dans chaque crise, il réprime davantage jusqu’à devenir inhumain (le soulevement d’octobre 1988 – Le Hirak de février 2019). Cette possibilité qu’a le système de perdurer n’est que la traduction de l’absence d’un changement en profondeur. Ce n’est pas une question de changement de président ou de gouvernement mais de système politique. La radicalité nous impose une approche révolutionnaire et non politique. Nous avons expérimenté, par le passé, la voie des élections et celle-ci est une aporie démocratique ; les coups d’Etats survenus dernièrement en Afrique attestent que la modernité politique dans l’absence d’une souveraineté authentique ne sont synonymes ni de stabilité ni de développement. Le cas de l’Algérie est plus complexe car le pouvoir visible de la façade démocratique repose sur le pouvoir invisible et réel des Militaires. Mais n’empêche que la Souveraineté authentique ne peut-être que populaire. Le moment est venu pour que les élites populaires prennent leurs responsabilités. La Révolution c’est le passage d’une souveraineté à une autre : de celle de l’Armée à celle du peuple.
  • L’absence d’idéologie dans la phase révolutionnaire. En se voulant unitaire afin de réaliser le changement radical qui reste la revendication prioritaire du Hirak, l’idéologie n’a pas de place dans cette phase révolutionnaire du Hirak. L’idéologie est par essence un débat conflictuel donc source de division et dans le cas de l’Algérie, celle-ci est synonyme d’éclatement[19]. Toute approche idéologique, dans la situation actuelle, est une mauvaise interprétation et une fausse traduction du Hirak. Tout projet de société est une mise entre parenthèse du Hirak et l’utilisation de celui-ci dans une vision idéologique qui est antérieure à son existence. Une bonne lecture du « Hirak populaire » est donc à la fois nécessaire et salutaire : Le Hirak n’a pas de couleur politique donc l’orienter idéologiquement c’est signer son arrêt de mort.
  • L’Algérie indépendante est née avec un seul drapeau. Il est le symbole de notre unité et de notre existence en tant que nation souveraine. L’Algérie indépendante est donc inséparable de ce drapeau. Le sentiment national est intimement lié à ce drapeau car à chaque apparition de celui-ci dans une manifestation, durant la période coloniale, le sang coulait. Le 21 mars 2019 à l’Université de Tizi-Ouzou, un homme dont nul ne peut douter ni de son loyalisme, ni de son Algérianité, ni de sa berbérité, ni de son nationalisme a brandi le drapeau national comme symbole d’action unificatrice. Au moment le plus politique de notre histoire indépendante où une unanimité populaire a surgi pour désigner le pouvoir comme le « coupable » de notre déchéance apparaît la question identitaire ; elle a apporté plus de confusion que de clarté.

Le drapeau national est le symbole de notre Algérianité qui symbolise notre personnalité historique : Berberité – Islamité – Algérianité.

Les pays traditionnels avec leurs drapeaux en Europe existaient avant l’unification de ces pays en Etats-nations. Mais après l’unification, ces drapeaux n’apparaissaient que dans des circonstances historiques propres à chaque région et l’ensemble de ces pays ont adopté le drapeau européen comme symbole de leur appartenance civilisationnelle ; en Algérie l’emblème « Kabyle »  est postérieur à l’unité nationale, d’où la légitimité du questionnement[20]. Notre vision, dans une Algérie authentiquement souveraine, cet emblème flottera sur l’ensemble de l’Afrique du Nord et englobera l’Amazighité et nous redonnerons vie au projet de l’Etoile nord-africaine[21].

  • Non aux Appels anonymes : Octobre en est l’exemple édifiant. L’espoir soulevé a fini dans un bain de sang. Le 22 février s’inscrit aussi dans cette logique anonyme. Si la police politique en Algérie ne contrôle pas tout le réel, sa mainmise sur l’espace social est réelle ; il s’avère que les appels anonymes n’aboutissent jamais à atteindre les objectifs de la colère populaire mais servent principalement à faire perdurer le système donc la force anonyme, la commanditaire de ces appels anonymes.
  • Le projet révolutionnaire précède la rue. Ce principe complète le précédent et lui donne sens. Les Algériens, depuis des décennies n’ont fait que sortir manifester mais sans que cela n’aboutisse à changer l’ordre politique car le projet était soit inexistant soit partisan. Le temps est venu de donner la priorité au projet révolutionnaire, donc à l’organisation. Ainsi les revendications et les slogans sont définis à l’avance car déjà élaborés dans une vision révolutionnaire.

L’Algérie du peuple conseille aux militants dans la période actuelle de ne pas s’exposer inutilement au danger. Le pouvoir n’a jamais été aussi fragile et aux abois qu’il ne l’est actuellement et c’est pour cela qu’il veut étouffer toute voix contestataire ; la situation ressemble à celle vécue par les militants dans les années 50, ne pas s’exposer pour ne pas être emprisonné mais s’organiser afin de constituer une force pour se préparer au grand jour. Lorsque la situation sera jugée révolutionnaire, l’Algérie du peuple prendra ses responsabilités. Ne pas répondre aux appels anonymes est en soi un signe de maturité politique et, une victoire sur la police politique. Deux conditions pour que l’appel soit effectif : la source de l’Appel doit être identifiée et accompagnée d’un projet révolutionnaire populaire.

  • Silmiya comme stratégie révolutionnaire. Si toute la philosophie de l’histoire moderne atteste que la violence est fondatrice car dans sa lutte pour son droit à la reconnaissance le dominé a nécessairement recours à la violence, en Algérie, le choix de la Silmiya s’est imposé comme stratégie révolutionnaire.

Un choix qui répond à une compréhension de la réalité politique en Algérie où la violence est profondément ancrée dans l’inconscient collectif et trouve ses racines dans le trauma colonial ;  ce choix s’inspire aussi de notre histoire d’indépendance où des soulèvements pacifiques et populaires ont changé le cours de l’histoire ( mai 1945, décembre 1960, octobre 1961). A chaque soulèvement, mains nues, pacifiquement, les Algériens sortis de leur quartiers ségrégués ont investi les quartiers européens: l’espace du pouvoir.

Silmiya est un choix aussi philosophique pour donner une gifle au pouvoir, à ses affidés et à sa clientèle que ce peuple jugé immature, incivique est susceptible d’écrire une nouvelle fois l’une des plus belles pages de l’histoire d’émancipation des peuple en faisant de Silmiya un concept révolutionnaire.

  • L’acteur révolutionnaire : l’individu citoyen

Chaque révolution nécessite la présence d’un acteur révolutionnaire (Un groupe, une classe, un chef charismatique, une institution). Dans l’histoire récente, dans le cas de l’Espagne après la mort de Franco, l’institution royale a joué le rôle fédérateur, dans le cas de l’Italie, l’opération « Mains propres » initiée par l’institution judiciaire a redressé l’Italie, en Pologne un mouvement syndical a incarné l’image du renouveau ; dans le cas de l’Algérie, nous devons reconnaître qu’il n’existe aucune institution susceptible de remplir cette mission.  D’autant plus que le Hirak est une mise entre parenthèse de l’ensemble du champ politique où les partis politique sont plus un facteur de blocage que de changement : qui sera alors l’acteur révolutionnaire ? Comme à l’époque coloniale, la citoyenneté est absente en Algérie. Il y a des individus où certains sont plus égaux que les autres. Des nantis, des oppresseurs, des priviligiés, des maîtres et des révoltés, des damnés, des exclus, des harragas. Toutes les catégories existent sauf celle de la citoyenneté.

  • Le nouvel homme du peuple est l’individu-citoyen. Le « Hirakiste » qui aspire à fonder la cité et la citoyenneté qui l’accompagne. Ces individus-citoyens peuplent l’Algérie et seront les acteurs du changement.

Ce front antisystème, ce pacte républicain tendent à faire revivre l’espoir que le changement radical est possible et permettra de dynamiser ainsi le mouvement contestataire à ‘intérieur et créer une situation révolutionnaire. Dans ce climat de soulèvement insurrectionnel généralisé, une période transitoire s’invite d’elle-même autour de la philosophie de la Refondation.

  • L’ossature fondamentale de « Refonder » est la souveraineté populaire.

(du peuple algérien l’arbitre souverain des luttes entre partis et entre tendances )

Cette « Algérie alternative » fruit de la stratégie révolutionnaire, de ce front antisystème a un seul objectif : asseoir définitivement la souveraineté populaire comme seule et unique volonté politique. En 1962, un groupe s’est accaparé par la force la souveraineté nationale et l’a incarnée. Depuis cette date, l’Armée s’est érigée comme étant la détentrice réelle de la souveraineté nationale et a imposé sa volonté et ses choix ; le refus catégorique en 2019 de répondre aux revendications légitimes du peuple et d’imposer la légalité constitutionnelle qu’elle a instituée et qu’elle contrôle ; l’Armée atteste et signe que le Peuple n’est qu’un appendice de son existence. Sa volonté est première, ontologique : celle du Maître des lieux. La révolution consiste à faire advenir un nouvel ordre, une nouvelle souveraineté, la souveraineté authentique : celle du peuple.

Instaurer la souveraineté populaire c’est achever le processus de libération entamé en novembre 54. C’est admettre que le Peuple qui a libéré l’Algérie est capable de la bâtir et de la faire prospérer. Ni avant-garde, ni paternalisme, ni infantilisme, le Peuple comme seul arbitre souverain entre les projets politiques et les tendances proposés dans l’espace public.

Refonder c’est repenser radicalement notre présence au monde. Restaurer notre personnalité algérienne complétement dévoyée par l’Algérie des Généraux. Face à la culture militaire de l’Algérie des Généraux, culture de spoliation, d’oppression et de mépris nous prônons la culture populaire de l’Algérie du peuple : une culture d’édification. Celle de l’homme du peuple, celle de l’Algérien authentique, celle de l’Algérien résistant autour des valeurs d’honneur, de générosité, de dignité et de Justice.

Croire dans notre Algérianité c’est avant tout croire que l’homme du peuple, jusque-là méprisé et meurtri, a tant souffert dans son histoire continue à espérer qu’un jour viendra où l’Algérie sera vraiment son chez soi. La restauration de notre Algérianité fera de cet espoir une réalité certaine.

  • Les deux sources politico-historiques de notre doctrine de la Refondation
  1. L’Appel du premier novembre 54 : La restauration de l’état algérien souverain, démocratique et social dans le cadre des principes islamiques.

En donnant la priorité cette fois-ci à la Restauration de l’être algérien et à la fondation de la souveraineté authentique : celle du peuple

  1. Le contrat de Rome. Cette plateforme reste toujours d’actualité principalement dans son volet A cadre et Valeurs et le Volet E retour à la Souveraineté populaire. En tournant le dos à cette offre politique, le Système, de facto, s’est mis en dehors du sens de l’histoire et son attitude est analogue à celle des Français d’Algérie qui n’ont jamais admis d’autre souveraineté que la leur en Algérie.

A la place des partis politique, le sujet historique, dans le Hirak populaire est l’individu citoyen.

  • Non à l’intervention étrangère :
  • Union des pays du nord-africain :

Appel de l’Algérie du Peuple

Génération du 22 février la tâche de la refondation est la vôtre. Réveillez-vous et levez-vous. Battez-vous dignement, justement et pacifiquement. N’admettez plus jamais qu’un homme ou un groupe social se permet de vous haranguer « HARRARNAKOUM on vous a libérés « KARRINAKOUM- on vous a instruits » « SAKANAKOUM on vous a logés ». N’admettez plus jamais, dans un pays où c’est vos pères et mères qui ont payé le prix fort du sacrifice qu’il existe une famille révolutionnaire bénéficiant de privilèges et déshonore les valeurs du Moudjahid. En Algérie, par votre combat libérateur, n’existera plus, qu’une seule catégorie de population : des Algériennes et des Algériens.

Quel est le modèle démocratique de l’Algérie alternative ? De qui sommes- nous les héritiers? Il est vrai, que dans notre imaginaire social, nous n’avons pas un modèle étatique passé qui nous guide au présent mais nous sommes les héritiers de l’esprit de résistance qui a jalonné notre histoire et nous a légué des pages glorieuses qui font notre honneur et notre gloire. L’esprit de Jughourta, l’Emir Abdelkader, Al Mokrani, Ben M’hidi continue à nous animer. Ces valeureux personnages, dans leur combat libérateur avaient tous le même rêve :  une vie digne et libre dans leur pays. Pouvons-nous admettre que ce rêve soit souillé par un système dont tous ses représentants sont l’antithèse de ces Hommes. Quelles sont les valeurs morales des « Occupants du Pouvoir », à quelle école de pensée appartiennent t-ils ? Le verdict de la sagesse populaire est sans appel :  c’est des voleurs et des criminels.

Génération du 22 févier, notre génération n’a pas failli mais elle a été trahie. On nous a fait croire que le pouvoir qui s’est installé en 62 allait achever le processus de libération, il nous a fallu du temps pour prendre conscience qu’il n’a fait que remplacer le colon en pire. Car au temps du colonialisme, aucun chef militaire français ne s’est permis de s’arroger le titre de RAB DZAïR. Comment peut-on admettre, sur cette terre bénie, arrosée par le sang des Algériens, que des individus se comportent comme des Dieux. Cela est-il admissible ? Cela est-il acceptable ?

Jusqu’à quand allons-nous supporter cela ? Jusqu’à quand accepterons-nous que le seul horizon pour notre jeunesse est l’aventure mortelle en Méditerranée et la déshérence dans une Europe qui ferme ses portes à l’étranger. Jusqu’à quand accepterons-nous, qu’un pays aussi riche que le nôtre génère la non-vie, où l’exil est un projet de vie et permet à une minorité l’aisance de la vie et insulter le peuple ? Jusqu’à quand accepterons-nous qu’un groupe anonyme décide qui rentre en Algérie et qui en sort ? Jusqu’à quand accepterons-nous qu’un système antinational parle au nom de l’Algérie, emprisonne et torture les porteurs d’espoir. Jusqu’à quand accepterons-nous que le pouvoir réel reste invisible ? Jusqu’à quand accepterons-nous que des clans mafieux nous gouverne? Jusqu’à quand accepterons-nous que dans les sphères du pouvoir existent tous les lobbys sauf le lobby algérien ?

Génération du 22 février.  Nous sommes dans l’urgence. L’existence de l’Algérie est en question : l’Algérie survivra-t-elle? Nous empruntons ce titre à Maurice Violette. Par ce titre, il entendait l’Algérie française car le parti colonial menait une politique suicidaire en Algérie. Leurs héritiers, les derniers pieds-noirs[22], les représentants de L’Algérie des Généraux sont une menace réelle pour l’existence de L’Algérie. Toute l’énergie déployée par ce système est uniquement au service de l’immobilisme.  Cet immobilisme politique est aussi suicidaire que l’était celui du parti colonial.  De crise en crise, de catastrophe en catastrophe, et chacune plus dévastatrice que la précédente, et n’ayant comme seul projet politique que le crime et le partager de la rente pétrolière, la prochaine crise, et elle est certaine, signera la fin de L’Algérie. La situation est plus explosive qu’elle ne l’était en 62. Le danger est plus grand. Car, face à la folie destructrice du parti colonial en 62, se sont dressées deux volontés déterminées : celle de l’Etat français et celle des combattants de l’intérieur.  

Ce système a trahi notre histoire.  Notre dette envers la génération indépendantiste est de sauvegarder et faire rayonner L’Algérie qu’ils nous ont léguée. Face au colonialisme, l’idée nationale a fait dresser toute une génération pour restaurer l’état algérien ; face au colonialisme intérieur, qui  se montre sous son vrai jour : antipopulaire et antinational ;  le Hirak de L’Algérie du peuple se dresse pour achever le processus de libération et instaurer une authentique souveraineté.

Etre Algérien ou ne plus l’être ? Les propos du père de Brahim Laalami, suite à la décision judiciaire prononcée contre son fils, « Maintenant, j’ai senti que je ne suis pas algérien et l’Algérie n’est pas mon pays», nous interpellent : que faire ?

Le temps des commentaires et des analyses est révolu. Le temps est à l’action révolutionnaire. Au projet Révolutionnaire. Donc à l’Organisation. L’Algérie du peuple dans sa première phase terminée en juillet demande votre adhésion. Celles et ceux qui se reconnaissent dans l’esprit et la philosophie de l’Algérie du peuple s’identifieront et signeront « Hirak de l’Algérie du peuple ». Inscrire le Hirak dans une vision révolutionnaire c’est lui assigner comme finalité : le changement radical.

Dans la 2ème phase, l’Algérie du peuple tiendra son congrès soit en décembre ou février 2024 pour déterminer la forme qu’elle prendra et clarifier sa philosophie révolutionnaire. Dans l’intervalle, nous comptons organiser un séminaire sur « Les Etats Généraux sur l’Algérie » pour marquer la nécessité de l’unité antisystème et nous attendons votre adhésion ainsi que vos propositions à notre adresse email algériedupeuple@gmail.com et sur notre site web : https://silmiya.net/

Jamais le sentiment d’unité, de solidarité, du bonheur d’être ensemble n’ont été aussi manifestes que dans le Hirak populaire. Ce moment s’est gravé dans nos consciences. De nouveau, nous existons en tant que Peuple. Nous avons renoué avec notre histoire, notre Algérianité, nos véritables héros et nous voulons faire revivre leur rêve d’une Algérie indivisible, juste et prospère. Faisons de ce rêve notre passion. Ils ont rêvé leur indépendance, à nous de rêver la Nôtre.  Génération du 22 février, vous êtes les dignes héritiers de cette terre et vous êtes son avenir. A vous de tracer un nouveau destin. Des Résistants aux Bâtisseurs. Vous en êtes capables. Eviter l’affaissement moral de l’Algérien et la dislocation de L’Algérie, c’est votre mission. L’accomplir ou la trahir ? A vous de prendre vos responsabilités.


C’est maintenant ou jamais.

 

 

[1] Mouloud Hamrouche « Le système algérien est antinational », El Watan 4 septembre 2019.

[2] Algérie – L’indépendance inachevée : entretien avec Mahmoud Senadji, Intégrale, 7 décembre 2021.

[3] Je fais référence au regretté Ait-Ahmed : « Les troupes de Boumediene se comportent comme une force l’occupation ».

[4] Mohamed Hachemaoui, « l’Armée est –elle derrière le soulèvement du Hirak », La Croix, 21 février 2020.

[5] « Armée et nation en Algérie : l’irrémédiable divorce « ?  François Gèze, dans Hérodote 2005/1 (N°116) p.175-203.

[6] José Garcon, « L’Algérie sur un volcan », Libération, 14 février 2011.

[7] L’impasse algérienne, le Figaro.

[8] A- José Garçon, cité par François Gèze, Armée et nation en Algérie : l’irrémédiable divorce ? dans Hérodote 2005 (N° 116, pages 175-203) p177.

[9] Mahmoud Senadji, « Algérie : le testament des décombres », Libération, 3 juin 2003.

[10]  Ali kafi, Du Militant politique au dirigeant militaire, Gasbah Editions, p.251. Je le cite « La réunion de Tripoli…. Pour la première fois, les dirigeants de la révolution ont abordé vraiment la question de l’organisation d’un parti, mais ils ont essuyé un échec cinglant …, la dislocation définitive des ranges de la Révolution au seuil de l’Indépendance, nous ont confirmé clairement la « non-naissance » historique du FLN en tant que parti politique. Cette « non-naissance » historique a poursuivi le fantôme FLN jusqu’à ce jour …. Un corps sans âme, ne pouvant exister que par la volonté de ceux qui représentent la réalité du pouvoir ( à travers l’uniforme militaire).

[11] Je fais référence au livre de Thomas Serres, L’Algérie face à la catastrophe suspendue. Gérer la crise et blâmer le peuple sous Bouteflika (2009-2014), Editions Karthala 2019.

[12] Je fais référence aux travaux du Politologue Mohammed Hachemaoui, « La corruption politique en Algérie : l’envers de l’autoritarisme », Esprit, juin 2011, pp. 111-135.

[13] Hannah Arendt, née Johanna Arendt1 le 14 octobre 1906 à Hanovre et morte le 4 décembre 1975 dans l’Upper West Side (New York), est une politologuephilosophe et journaliste allemande naturalisée américaine, connue pour ses travaux sur l’activité politique, le totalitarisme, la modernité et la philosophie de l’histoire.

[14] Mahmoud Senadji, « Algérie pays des simulacres », Oumma, 29 décembre 2008.

[15] Abdelkader, l’Encyclopédie des nuisances, n°6, février 1986, p.124-127.

[16] « Ma part » : c’est l’expression du moment, celle qu’on entend scander dans l’Algérie entière, de bas en haut ».  Florence Aubenas, dans l’Autoraute inachevée, le Monde, 6 août 2014.

[17] Christophe Boltanski, « Moudjahid, un fonds de commerce », Libération, 27 octobre 2004.

[18] L’Algérie du vendredi lors du « Hirak » fut le symbole du Génie populaire, de l’Algérie alternative et les jours de semaine caractérisés par l’ennui, le désespoir et la corruption sont le symbole de l’Algérie des Généraux.

[19] Dans l’absence d’un espace public, l’Autre n’est pas seulement à exclure mais à éradiquer. L’esprit des années 90 hante encore l’Algérie.

[20] Bouabsa Hocine-Nasser, « Drapeau amazigh ou drapeau de la discorde, Le Matin, 25 juin 2019.

[21] Hirak ou Révolution, 18 mars 2021 : https://youtube.com/watch?v=V5k5_w4o22w&feature=shared 

[22] Citation dite par un officier des services de Sécurité au journaliste Nicolas Beau, Papa Hollande au Mali, ed. Balland, p.57.

 

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